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Questionnaire et examen médicaux de préembauche: des pratiques qui ne passent pas le test
le mercredi 14 mars 2018
Modifié à 0 h 00 min le 14 mars 2018
Texte du Brossard Éclair
EMPLOI. Le questionnaire et l’examen médical préembauche pour les candidats aux postes de cols blancs sont des exercices courants à Brossard et Longueuil. Des pratiques qui s’avèrent à certains égards questionnables en regard des principes et règles de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. À Brossard, non seulement tous les candidats aux postes de cols blancs doivent remplir un questionnaire médical, mais ils sont tenus de passer un examen médical préembauche. Tous les candidats aux postes de cols blancs passent à travers les mêmes étapes: sélection, rencontre, test psychométrique, questionnaire de sécurité, bilan médical, demande de références. Cet examen médical, tout comme le questionnaire, est réalisé à l’externe par la firme Biron. L’examen consiste en un bilan de santé complet, incluant notamment un test d’urine. Une pratique servant à «s’assurer de la compatibilité de la personne avec l’emploi», affirme le directeur des communications de la Ville, Alain Gauthier. Les exigences varient toutefois en fonction du poste à combler. Le médecin à l’externe se voit fournir une description de tâche pour chacun des postes. Il déterminera de cette façon si l’employé est «compatible», «compatible avec limitations» ou «non-compatible» à l’emploi. Les détails sur son état de santé ne seront pas fournis à l’employeur. «Pour les employés de bureau, c’est sûr que ce ne sont pas les mêmes exigences qu’un opérateur de machinerie loure», illustre M. Gauthier. Malgré ces critères distincts en fonction du poste à combler, le bilan de santé complet demeure-t-il le meilleur chemin pour obtenir ces réponses? «Tout à fait», répond M. Gauthier. Parmi les éléments du questionnaire se trouvent notamment des questions sur la consommation, que ce soit d’alcool ou de drogues. «On ne se le cache pas, on veut s’assurer que le candidat n’a pas de problème de consommation qui pourrait avoir un impact sur son travail. Mais ça ne veut pas dire qu’on ne l’emploiera pas, si la personne répond par l’affirmative.» La firme Biron a refusé de remettre au journal une copie du questionnaire médical, jugé confidentiel. Longueuil: questionnaire à venir Dans la foulée des récents articles sur le sujet des questionnaires d’embauche, Longueuil a annoncé qu’elle modifierait son questionnaire médical à soumettre aux candidats. Élaboré par Medisys, ce questionnaire était conçu afin que le médecin puisse réaliser une évaluation complète de l’état de santé du candidat. «Il n’était pas développé spécifiquement pour les cols blancs et leurs besoins», évoque le chef de division des affaires publiques Louis-Pascal Cyr. «Êtes-vous enceinte?», «Êtes-vous dans votre période menstruelle actuellement?» figuraient entre autres parmi les questions de ce document. «Pour nous, ça n’avait aucune utilité», mentionne M. Cyr. Le questionnaire cherchait aussi à savoir par exemple si le candidat avait déjà eu une maladie d’oreille, du foie ou encore subi une blessure à la colonne vertébrale. Longueuil élabore actuellement un questionnaire plus restreint à ses besoins pour évaluer les potentiels cols blancs. Quant à l’examen médical préembauche, il est exigé dans les cas où le questionnaire «n’est pas suffisant pour être bien certain que le candidat a toutes les qualités requises pour occuper une fonction, signifie Louis-Pascal Cyr. Il est réalisé selon la description du poste. Il peut évaluer par exemple l’ouïe, la vue, les problèmes de dos, etc.» Ainsi, l’examen médical préemploi est obligatoire pour les candidats aux postes de brigadier, commis de bibliothèque, commis responsable du comptoir du prêt, préposé à l’instrumentation et à l’arpentage, préposé au contrôle des pièces à conviction, patrouilleur à la réglementation, technicien en arpentage; technicien en audio-visuel, technicien en gestion des documents et archives, et technicien en prévention incendie. Dans le cas des cols blancs, cette évaluation est effectuée par le bureau médical de la Ville. Tant en ce qui concerne les réponses du questionnaire que les résultats du bilan de santé, le médecin de la ville a un devoir de confidentialité et ne peut révéler d’informations sur l’état de santé d’un candidat aux ressources humaines de la Ville. «Nous ne sommes informés que lorsqu'il y a incompatibilité entre l'état de santé d'une personne et le travail pour lequel elle postule. Toute autre information reste confidentielle, assure M. Cyr. Le questionnaire est mis dans une enveloppe cachetée, qui ne se retrouve pas dans les mains des ressources humaines. Le bureau médical est à l’intérieur de ressources humaines, mais opère de façon un peu autonome.» L’examen peut toutefois être déterminant dans le choix ou non d’un candidat. En vertu d'un contrat de deux ans de 142 000$, un médecin a d’ailleurs été embauché afin de remplacer le départ à la retraite du médecin-conseil en novembre. Le médecin cumulera les tâches autrefois réparties entre deux médecins. Processus «discriminatoire» Selon l’article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne, il y a discrimination lorsque l’employeur établit une distinction sur la base de «la race, la couleur, le sexe, la grossesse, l’orientation sexuelle, l’état civil, l’âge (sauf dans la mesure prévue par la loi), la religion, les convictions politiques, la langue, l’origine ethnique ou nationale, la condition sociale, le handicap ou l’utilisation d’un moyen pour pallier ce handicap». Du côté de la Commission des droits de la personne, l’article protège tout le processus de sélection des candidats. «Le seul fait qu’on pose des questions sur l’état de santé, c’est de la discrimination, avance l’avocate à la directoin du contentieux de la Commission, Me Stéphanie Fournier. Les questions doivent référer à des aptitudes requises pour l’emploi.» C’est à l’employeur que revient la responsabilité de déterminer que les renseignements médicaux demandés réfèrent à des aptitudes requises par le poste convoité. «Il serait donc contraire à la Charte de faire remplir à des candidats, préalablement à l’embauche, des formulaires dans lesquels ils devraient donner toutes sortes de renseignement relatifs à leur état de santé», est-il écrit dans le document de la Commission Les examens médicaux en emploi. En regard de ces explications, un bilan de santé complet semble inapproprié et discriminatoire. Mêmes obligations pour la firme externe Par ailleurs, le médecin mandaté par les villes doit se soumettre aux mêmes obligations et responsabilités, même si la Ville n’utilise pas ou n’a pas accès aux données recueillies lors de l’évaluation de santé. «C’est le processus qui est discriminatoire, insiste Me Fournier. L’employeur a la responsabilité du processus qu’il délègue.» Me Fournier relève que les questions sur l’état de santé posées avant l’embauche portent également atteinte au droit du candidat à la vie privée (article 5 de la Charte) et à la dignité (article 4 de la Charte). Qu’en est-il ailleurs ? Parmi les 10 plus grandes villes du Québec, la moitié d’entre elles soumettent les candidats aux postes de cols blancs à un questionnaire médical. Quant à l’examen médical, il s’agit d’une pratique courante dans sept des 10 villes. Toutefois, il est fréquent que cet examen ne soit exigé pour certains postes.
EMPLOI. Le questionnaire et l’examen médical préembauche pour les candidats aux postes de cols blancs sont des exercices courants à Brossard et Longueuil. Des pratiques qui s’avèrent à certains égards questionnables en regard des principes et règles de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. À Brossard, non seulement tous les candidats aux postes de cols blancs doivent remplir un questionnaire médical, mais ils sont tenus de passer un examen médical préembauche. Tous les candidats aux postes de cols blancs passent à travers les mêmes étapes: sélection, rencontre, test psychométrique, questionnaire de sécurité, bilan médical, demande de références. Cet examen médical, tout comme le questionnaire, est réalisé à l’externe par la firme Biron. L’examen consiste en un bilan de santé complet, incluant notamment un test d’urine. Une pratique servant à «s’assurer de la compatibilité de la personne avec l’emploi», affirme le directeur des communications de la Ville, Alain Gauthier. Les exigences varient toutefois en fonction du poste à combler. Le médecin à l’externe se voit fournir une description de tâche pour chacun des postes. Il déterminera de cette façon si l’employé est «compatible», «compatible avec limitations» ou «non-compatible» à l’emploi. Les détails sur son état de santé ne seront pas fournis à l’employeur. «Pour les employés de bureau, c’est sûr que ce ne sont pas les mêmes exigences qu’un opérateur de machinerie loure», illustre M. Gauthier. Malgré ces critères distincts en fonction du poste à combler, le bilan de santé complet demeure-t-il le meilleur chemin pour obtenir ces réponses? «Tout à fait», répond M. Gauthier. Parmi les éléments du questionnaire se trouvent notamment des questions sur la consommation, que ce soit d’alcool ou de drogues. «On ne se le cache pas, on veut s’assurer que le candidat n’a pas de problème de consommation qui pourrait avoir un impact sur son travail. Mais ça ne veut pas dire qu’on ne l’emploiera pas, si la personne répond par l’affirmative.» La firme Biron a refusé de remettre au journal une copie du questionnaire médical, jugé confidentiel. Longueuil: questionnaire à venir Dans la foulée des récents articles sur le sujet des questionnaires d’embauche, Longueuil a annoncé qu’elle modifierait son questionnaire médical à soumettre aux candidats. Élaboré par Medisys, ce questionnaire était conçu afin que le médecin puisse réaliser une évaluation complète de l’état de santé du candidat. «Il n’était pas développé spécifiquement pour les cols blancs et leurs besoins», évoque le chef de division des affaires publiques Louis-Pascal Cyr. «Êtes-vous enceinte?», «Êtes-vous dans votre période menstruelle actuellement?» figuraient entre autres parmi les questions de ce document. «Pour nous, ça n’avait aucune utilité», mentionne M. Cyr. Le questionnaire cherchait aussi à savoir par exemple si le candidat avait déjà eu une maladie d’oreille, du foie ou encore subi une blessure à la colonne vertébrale. Longueuil élabore actuellement un questionnaire plus restreint à ses besoins pour évaluer les potentiels cols blancs. Quant à l’examen médical préembauche, il est exigé dans les cas où le questionnaire «n’est pas suffisant pour être bien certain que le candidat a toutes les qualités requises pour occuper une fonction, signifie Louis-Pascal Cyr. Il est réalisé selon la description du poste. Il peut évaluer par exemple l’ouïe, la vue, les problèmes de dos, etc.» Ainsi, l’examen médical préemploi est obligatoire pour les candidats aux postes de brigadier, commis de bibliothèque, commis responsable du comptoir du prêt, préposé à l’instrumentation et à l’arpentage, préposé au contrôle des pièces à conviction, patrouilleur à la réglementation, technicien en arpentage; technicien en audio-visuel, technicien en gestion des documents et archives, et technicien en prévention incendie. Dans le cas des cols blancs, cette évaluation est effectuée par le bureau médical de la Ville. Tant en ce qui concerne les réponses du questionnaire que les résultats du bilan de santé, le médecin de la ville a un devoir de confidentialité et ne peut révéler d’informations sur l’état de santé d’un candidat aux ressources humaines de la Ville. «Nous ne sommes informés que lorsqu'il y a incompatibilité entre l'état de santé d'une personne et le travail pour lequel elle postule. Toute autre information reste confidentielle, assure M. Cyr. Le questionnaire est mis dans une enveloppe cachetée, qui ne se retrouve pas dans les mains des ressources humaines. Le bureau médical est à l’intérieur de ressources humaines, mais opère de façon un peu autonome.» L’examen peut toutefois être déterminant dans le choix ou non d’un candidat. En vertu d'un contrat de deux ans de 142 000$, un médecin a d’ailleurs été embauché afin de remplacer le départ à la retraite du médecin-conseil en novembre. Le médecin cumulera les tâches autrefois réparties entre deux médecins. Processus «discriminatoire» Selon l’article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne, il y a discrimination lorsque l’employeur établit une distinction sur la base de «la race, la couleur, le sexe, la grossesse, l’orientation sexuelle, l’état civil, l’âge (sauf dans la mesure prévue par la loi), la religion, les convictions politiques, la langue, l’origine ethnique ou nationale, la condition sociale, le handicap ou l’utilisation d’un moyen pour pallier ce handicap». Du côté de la Commission des droits de la personne, l’article protège tout le processus de sélection des candidats. «Le seul fait qu’on pose des questions sur l’état de santé, c’est de la discrimination, avance l’avocate à la directoin du contentieux de la Commission, Me Stéphanie Fournier. Les questions doivent référer à des aptitudes requises pour l’emploi.» C’est à l’employeur que revient la responsabilité de déterminer que les renseignements médicaux demandés réfèrent à des aptitudes requises par le poste convoité. «Il serait donc contraire à la Charte de faire remplir à des candidats, préalablement à l’embauche, des formulaires dans lesquels ils devraient donner toutes sortes de renseignement relatifs à leur état de santé», est-il écrit dans le document de la Commission Les examens médicaux en emploi. En regard de ces explications, un bilan de santé complet semble inapproprié et discriminatoire. Mêmes obligations pour la firme externe Par ailleurs, le médecin mandaté par les villes doit se soumettre aux mêmes obligations et responsabilités, même si la Ville n’utilise pas ou n’a pas accès aux données recueillies lors de l’évaluation de santé. «C’est le processus qui est discriminatoire, insiste Me Fournier. L’employeur a la responsabilité du processus qu’il délègue.» Me Fournier relève que les questions sur l’état de santé posées avant l’embauche portent également atteinte au droit du candidat à la vie privée (article 5 de la Charte) et à la dignité (article 4 de la Charte). Qu’en est-il ailleurs ? Parmi les 10 plus grandes villes du Québec, la moitié d’entre elles soumettent les candidats aux postes de cols blancs à un questionnaire médical. Quant à l’examen médical, il s’agit d’une pratique courante dans sept des 10 villes. Toutefois, il est fréquent que cet examen ne soit exigé pour certains postes.
Villes | Questionnaire médical | Examen médical |
Montréal | Oui | n.d. |
Québec | Non, sauf pour les brigadiers, pompiers, policiers et employés du 911. | Non, sauf pour les brigadiers, pompiers, policiers et employés du 911. |
Laval | Oui | Non |
Gatineau | Oui, pour des postes nécessitant une capacité physique de soulever et manipuler à répétition des charges | Oui, pour des postes nécessitant une capacité physique de soulever et manipuler à répétition des charges «Exceptionnel» |
Longueuil | Oui | Oui, pour certains postes (voir texte) |
Sherbrooke | Oui, lors de l’examen | Oui, considéré «peu invasif» |
Lévis | Non | Oui, pour certains postes (commis aux archives, chef et commis magasinier, 911) |
Saguenay | Non | Oui |
Trois-Rivières | Non | Oui, pour plus de 24 postes, dont commis aux bibliothèques; messager; préposé aux stationnements; spécialiste en environnement; technicien développement du territoire; technicien Surveillance de chantier; technicien de laboratoire; technicien en architecture; technicien en système d’information; technicien en informatique; technicien juridique; et technicien inspecteur |
Terrebonne | Non | Non |