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Boul. Édouard : une locataire dénonce une résiliation de bail aux allures de «rénoviction»

le jeudi 09 février 2023
Modifié à 14 h 55 min le 09 février 2023
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

Le 1565, boul. Édouard, dans l’arr. de Saint-Hubert compte 32 logements. (Photo: Le Courrier du Sud – Ali Dostie)

Jean Senécal estime que l’avis de résiliation de bail qu’a reçu sa fille pour son logement du 1565, boul. Édouard, dans l'arr. de Saint-Hubert à Longueuil a toutes les allures d’une rénoviction. Le gestionnaire justifie ce geste par la reconstruction complète du logement à la suite d’un incendie survenu en janvier 2022. 

M. Senécal assure toutefois que les flammes ont épargné l’appartement de sa fille et que la présence d’amiante serait en cause. 

Dans la lettre signée en août 2022 de la main d’un avocat représentant Gestion Rochefort & Tessier l’informant de la résiliation de son bail, Jessika Senécal a aussi appris qu’advenant qu’elle souhaite signer un nouveau bail, il ne serait pas soumis aux règles de fixation de loyer pour les cinq prochaines années. 

Selon le site Web de Remax, qui gère la location des logements de cet immeuble, le loyer pour les 4 ½ dépasse les 1 200$. C’est bien loin des 730$ convenus au bail 2022-2023 de Mme Senécal.

Rénovations

Jean Senécal soutient que seuls trois logements ont été endommagés par l’incendie de janvier 2022. «Quand on est entrés dans le logement de ma fille, ça ne sentait presque pas la fumée», illustre-t-il. 

Au départ, les locataires qui avaient signifié leur intention de rester avaient été informés qu’ils pourraient réintégrer leur logement en juin 2022. Puis, ç’a été reporté en mars 2023.

Un permis de construction daté du 13 janvier 2022 qu’a obtenu le citoyen auprès de la Ville de Longueuil indique des travaux de «dégarnissage partiel intérieur à la suite d’un incendie». 

En mai s’est ajouté un permis pour effectuer des correctifs structuraux. D’autres permis émis en juin évoquent «la rénovation d’un multifamilial suite à un incendie, rénovation des logements touchés». Il est aussi question de remplacer la plomberie, la ventilation et l’électricité, ainsi que des portes et fenêtres touchées en façade.

Les murs et plafonds du logement ont été complètement arrachés. Jean Senécal a appris d’un contremaitre sur le chantier que la présence d’amiante dans l’immeuble expliquerait ces travaux.

Selon M. Senécal, dans ces circonstances, le propriétaire se devait de respecter le renouvellement de bail signé. Il s’insurge aussi que Gestion Rochefort & Tessier s’appuie sur l’article 1955 du Code civil, selon lequel un propriétaire peut hausser comme il le souhaite le loyer d’un immeuble nouvellement bâti dans les cinq ans suivant la construction.
«Ce sont pour les bâtiments neufs, pas pour les rénovations», fait-il valoir.

Il a fait une plainte pour être entendu au Tribunal administratif du logement (TAL).

Perte ou non

Un locateur peut mettre fin à un bail seulement selon certaines conditions. 

«Suite à un sinistre comme un incendie, la destruction totale ou même partielle, si le logement peut être qualifié de perte, entraîne la résiliation du bail», cible Denis Miron, du service des communications du TAL.

Toutefois, lorsque le logement n’est pas considéré comme une perte, le locateur doit effectuer les réparations nécessaires. Si ces travaux nécessitent une évacuation du logement, le propriétaire doit envoyer un avis et verser une indemnité correspondant aux dépenses reliées à l'évacuation.

«L’exécution des travaux n’affecte aucunement le droit au maintien dans les lieux des locataires, soutient M. Miron. Le locataire dont le logement fait l’objet de travaux majeurs peut demeurer dans son logement, réintégrer celui-ci si une évacuation temporaire s’est avérée nécessaire, et reconduire ensuite son bail au moment opportun.»

Clause F

Par ailleurs, Denis Miron précise qu’un «immeuble presque entièrement reconstruit, que ce soit suite à une démolition ou un sinistre», peut parfois être considéré comme une nouvelle construction. La restriction de l’article 1955 s’appliquerait, mais le locateur doit le spécifier à la section F du bail.

«Les causes soumises au Tribunal sont jugées au cas par cas, en fonction de la preuve présentée en audience, des faits propres à chaque dossier et des représentations effectuées par les parties», nuance-t-il aussi.

Gestion Rochefort & Tessier a indiqué que «compte tenu de la nature de l’information, nous ne commenterons pas publiquement un cas spécifique».
 

En rappel : Évincés, les sinistrés du boul. Édouard doivent se reloger