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Élections fédérales 2025

Candidates libérales: le voisin américain s’immisce dans la campagne 

le mercredi 16 avril 2025
Modifié à 16 h 18 min le 15 avril 2025
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

Alexandra Mendès et Sherry Romanado. (Photo : Le Courrier du Sud –Ali Dostie)

Les campagnes locales des députées sortantes libérales Alexandra Mendès et Sherry Romanado ne diffèrent pas des sujets prédominants exposés au national. La guerre commerciale avec les États-Unis demeure l’enjeu numéro 1 au cœur des préoccupations des électeurs. Ce combat contre «une menace commune» crée même un effet mobilisateur.

«On veut faire partie de la solution. On a eu beaucoup de demandes : qu’est-ce qu’on peut faire pour vous aider?» témoigne Sherry Romanado, qui souhaite se faire réélire dans Longueuil–Charles-LeMoyne. 

Sa collègue de Brossard–Saint-Lambert, circonscription voisine, abonde dans le même sens. «Les offres d’aide sont très spontanées», dit Alexandra Mendès. 

Les citoyens craignent certes les répercussions des multiples tarifs et contre-tarifs qui s’additionnent. Mme Mendès constate que plusieurs de ses concitoyens suivent assidûment le cours de la bourse sur des applications. «Je n’avais jamais vu ça jusqu’à dernièrement!»

 «Ils sont soulagés avec l’arrivée de Mark Carney, fait valoir Mme Romanado, car ils trouvent que c’est quelqu’un de calme, compétent, nouveau… un économiste.» 

Les propos incendiaires du président Donald Trump, tout particulièrement concernant les menaces de faire du Canada le 51e État, suscitent peut-être même davantage de craintes. 

«Il n’est pas question de céder en douce la souveraineté du Canada, on va la défendre bec et ongles», tranche Mme Mendès, qui évoque le renforcement les liens avec l’Europe et qui estime que la récente présence de la ministre des Affaires étrangères à l’OTAN a grandement aidé. 

«Vous savez que je suis d’une famille de miliaires… Tous les propos disant que l’on n’a rien fait pour les États-Unis…  Plusieurs ont de la misère. Les familles canadiennes ont perdu 158 militaires pendant la guerre en Afghanistan. Je crois qu’il y a des blessures», ajoute Mme Romanado. 

Gaza s’invite

En traitement intensif pour soigner un cancer et devant conjuguer avec la baisse d’énergie que ça entraîne, Alexandra Mendès réduit au minimum le porte à porte. Elle rencontre néanmoins des électeurs dans son local électoral, puis correspond de multiples façons avec les citoyens. 

La deuxième plus grande préoccupation dont elle entend parler dans sa circonscription qui compte une forte population musulmane, ce ne sont ni les baisses d’impôt, ni l’accès à la propriété, mais la situation à Gaza. 

Alexandra Mendès (Photo : Le Courrier du Sud - Ali Dostie)

«Cela vient ternir beaucoup la capacité que j’ai de dialoguer avec certains citoyens. C’est un noyau de personnes très activistes et engagées. Je comprends très bien leurs inquiétudes, leur rage, leur sentiment d’impuissance, relate-t-elle. Mais le Canada ne peut pas régler seul la situation et c’est là-dessus qu’on a un problème; ce message ne passe pas.»

À ses yeux, que le Canada reconnaisse la Palestine – ce que réclament ces citoyens – ne changerait rien à la situation tant qu’Israël peut compter sur l’appui des États-Unis.

Deux circonscriptions, enjeux distincts

Les différences démographiques entre Brossard–Saint-Lambert et Longueuil–Charles-Le Moyne semblent inévitablement se répercuter dans les enjeux locaux qui animent les citoyens. 

Sherry Romanado évoque entre autres la préoccupation des logements abordables.  «On a fait des progrès, avec la province et la Ville. Je crois que ce sont 770 unités de logement abordable qu’on a construites ici. On avance, mais le problème, c’est que ça fait des années qu’il n’y a pas eu d’investissements, indique-t-elle. On a beaucoup de rattrapage à faire, mais on n’a pas beaucoup de terrain.»

Sherry Romanado (Photo : Le Courrier du Sud - Ali Dostie)

Parmi les engagements du Parti libéral en la matière, notons la création de «Maisons Canada», qui accorde un rôle au gouvernement fédéral dans la construction résidentielle abordable à grande échelle. L’engagement est de construire 500 000 logements par an à la grandeur du pays. 

Chez la circonscription voisine, l’environnement vient très fréquemment aux oreilles de Mme Mendès. «Le gros des préoccupations, c’est la durabilité de notre environnement et l’économie qui va avec. Et on parle un peu plus d’itinérance à cause du REM : ça en a amené près des stations.»

Infrastructures municipales

Toutes deux relèvent toutefois la nécessité d’investir dans les infrastructures municipales de traitement des eaux, qui atteignent leur fin de vie utile. Pour l’agglomération de Longueuil, les besoins se chiffrent à un milliard de dollars. 

«Ce qu’on a comme problématique à Brossard, et que j’amène depuis je ne sais pas combien de temps, c’est que pour construire, on n’a plus de capacité de traitement d’eau usée et potable. J’en avais parlé au ministre. J’aimerais que le gouvernement fédéral réserve une partie de son budget d’infrastructures pour ce type d’infrastructures. Elles sont nécessaires si on veut construire», soutient Mme Mendès. 

Celle-ci déplore au passage que l’approbation du provincial se fait parfois beaucoup attendre, lorsque le fédéral octroie des fonds aux municipalités pour ces enjeux. 

« On ne peut plus blairer ton chef »

Dès l’annonce de démission de Justin Trudeau, le Parti libéral du Canada a lentement repris du poil de la bête dans les sondages, lui qui était en chute libre depuis plusieurs mois. Les sondages et projections lui donnent toujours une confortable avance.

L’arrivée de Mark Carney, mais aussi le départ de celui qui a été premier ministre pendant 10 ans, n’y sont évidemment pas étrangers. 

«Ce qui était devenu le boulet, à tort ou à raison : le PM était devenu une figure très divisive. Depuis 2019, et en 2021, beaucoup des électeurs le disaient : je n’ai pas de problème avec le programme, mais j’aime pas votre chef. C’était encore dans le modéré. Mais là, c’était devenu : «J’en peux plus! On ne peut plus blairer ton chef». J’ai passé l’été à n’entendre que cela!» lance Mme Mendès, concernant les propos des citoyens lors des célébrations de la Fête nationale au parc de la Voie maritime. «Et aux Fêtes de Saint-Lambert, qu’est-ce que vous pensez que j’ai entendu dans mon kiosque, les trois jours?!»

A contrario, la population voit M. Carney comme l’«homme de la situation», croit Mme Romanado. 

«Je pense que les Canadiens en général sont beaucoup plus à tendance libérale, petit «l», dans leur façon de voir la vie, leurs valeurs. Ils sont plus attirés par les partis plus progressistes que conservateurs», analyse Alexandra Mendès.

Alexandra Mendès et Sherry Romanado ont toutes deux été élues pour la première fois en 2015, puis réélues en 2019, après un passage de la vague orange sur la Rive-Sud. 

Rappelons que le candidat de Longueuil–Saint-Hubert, Natilien Joseph, devait aussi prendre part à cette entrevue. Il ne s’est pas pointé. Le Journal a proposé une entrevue individuelle et attend un retour.