Championnats de boccia: Dorya Belal vise les Jeux paralympiques
DÉPASSEMENT. Imaginez que vous êtes un lanceur droitier et assis sur un fauteuil roulant, vous devez lancer une boule de cuir du bras gauche, mais avec une bande élastique rigide qui le retient vers l'arrière.
C'est ce que la Brossardoise Dorya Belal, 18 ans, ressentait à chacun de ses lancers (sans attache) lorsqu'elle a participé aux Championnats canadiens de boccia au cegep Édouard-Montpetit de Longueuil, du 17 au 19 mars.
C'est son père et entraîneur Skender, un enseignant en éducation physique, qui explique ainsi l'effet que la quadriparésie spastique produit sur le corps de sa fille, née prématurément avec un manque d'oxygène. Cette maladie entraîne une paralysie partielle et une diminution de la force musculaire, qui n'ont pas empêché Dorya d'améliorer de façon prodigieuse son lancer depuis deux ans.
Elle qui était incapable de lancer une boule a participé aux Jeux du Québec de 2015, dans la catégorie BC3 (athlète pouvant être aidé par un appareil). Au boccia, un peu comme à la pétanque, deux adversaires doivent lancer six boules et espérer être le plus près de la boule blanche, appelée jack. Le match comporte quatre manches.
Dos au jeu pour ne pas influencer Dorya, Skender tenait une rampe avec une hauteur de pente descendante et une direction décidée par Dorya. Elle y déposait sa boule en visant le jack.
Changement de catégorie imprévu
«Dorya avait beaucoup de plaisir à jouer et les Jeux du Québec ont été un gros catalyseur. L'étape suivante était le Défi Sportif en avril 2015 et Dorya a reçu la pire et la meilleure nouvelle en même temps. Un officiel l'a évalué et a été direct. ''Tu es une athlète BC1, tu peux lancer la balle par toi-même avec assistance'', relate son père et entraîneur. Sur le coup c'était cruel pour elle, habituée de jouer de façon récréative. Pour être positif, je lui ai dit qu'au moins je pourrai la regarder jouer au complet, au lieu de tourner le dos au jeu!»
Deux ans plus tard, elle a fait une entrée du tonnerre à ses premiers Nationaux à Longueuil. À son premier match, elle a battu celui qui est devenu le champion canadien BC1, le Québécois Éric Bélanger, 3 à 2. Elle réussit maintenant des tirs frôlant les 10 mètres. Elle a même un peu imité les joueurs du Canadien. Après cette surprenante victoire, elle a perdu ses deux duels suivants, dont un contre un adversaire qu'elle avait l'habitude de battre.
«Mais ce n'est pas grave, dit Dorya, dont les capacités cérébrales sont normales et qui s'exprime très bien. Il faut perdre pour devenir meilleure.»
«Du moment que j'ai du plaisir à jouer et que je prends de l'expérience, c'est ce qui compte. Je suis toujours heureuse de jouer», a-t-elle raconté au micro d'une responsable de Boccia Canada qui l'interviewait.
Pour son père, terminé la rampe le dos au jeu. Il s'assure qu'elle est bien attachée à son fauteuil pour un meilleur équilibre, place le fauteuil dans un certain angle, lui replace la tête droite, qu'elle a tendance à baisser vers la droite à cause d'une scoliose, lui place une boule dans la main et retourne derrière elle sans dire mot, lui laissant toute son autonomie comme les règlements l'exigent.
Viser les Jeux paralympiques
«Les objectifs de Dorya ont évolué, remarque M. Belal. Elle est déjà dans la sélection du Québec et veut faire partie de l'équipe canadienne et rêve de participer aux Jeux paralympiques. Je devrai la faire progresser sur plusieurs points techniques et lui faire gagner de la force, une priorité pour avoir du succès aux plus hauts niveaux. À force de faire des compétitions elle se fatiguera mois vite».
Fatiguée? «La concentration demandée quand on lance avec sa maladie est énorme, explique l'entraîneur, à la recherche d'un gymnase pour que Dorya puisse s'entraîner. Dormir en hôtel, sans lit adapté, est une grosse adaptation. Mais elle est prête à tout.»