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Fermeture du CHSLD Valeo: des aînés devant l'inconnu

le samedi 12 juin 2021
Modifié à 11 h 21 min le 12 juin 2021
Par Michel Hersir

mhersir@gravitemedia.com

Le Courrier du Sud - Archives

Les aînés du CHSLD privé Valeo à Saint-Lambert, dont certains ayant un lourd handicap, devront vraisemblablement se trouver un nouveau domicile. Alors que le bail entre le propriétaire et l’exploitant, le Groupe Sedna, se termine en octobre, un terrain d’entente n’a pu être trouvé avec le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) pour permettre aux résidents d’y demeurer.

C’est ainsi que les 78 résidents de l’établissement devront quitter au 30 septembre prochain, une situation précaire pour ceux-ci et leur famille. 

«Ça me choque, parce que ça prend les résidents en otage, explique Lucie Laplante, dont la mère habite au CHSLD Valeo depuis septembre 2020. Pour ces gens, le déménagement, les nouveaux employés, le changement d’environnement, ça peut être effrayant. Après tout ce qu’ils ont vécu avec la pandémie, ils méritent d’avoir un peu de paix.»

Le bail de 10 ans du propriétaire et de l’exploitant vient à échéance en octobre. Tant Groupe Sedna que le propriétaire de l’immeuble voulaient un renouvellement de 10 ans. Le Ministère a toutefois offert au Groupe Sedna de le prolonger pour deux ans seulement.

Ce dernier affirme qu’il aurait été prêt à aller de l’avant avec un engagement plus court, mais le propriétaire de l’immeuble aurait catégoriquement refusé.

«Des discussions entre le Groupe Sedna et le propriétaire du bâtiment n’ont cependant pas permis d’en arriver à une entente pour une prolongation de bail de 2 ans», confirme pour sa part la porte-parole du CISSS de la Montérégie-Centre Martine Lesage.  

Des «manques»

Cette proposition d’un bail de deux ans venant du Ministère est justifiée par le fait que l’exploitant doit fournir, depuis février 2020, un rapport précisant les correctifs apportés à la qualité des soins et services. «Ce rapport est attendu en suivi à une inspection du MSSS réalisée au CHSLD Valéo en 2019», précise Mme Lesage.

Au micro du 98,5 vendredi, la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants Marguerite Blais a affirmé qu’il y avait eu des «manques» dans l’établissement. 

Selon la responsable des communications pour le Groupe Sedna Julie Grenier, cet argument de la Ministre serait une façon pour elle de se cacher derrière une défense facile.

«La Ministre pointe du doigt le rapport d’évaluation de milieu de vie, mais ce sont des détails, défend Mme Grenier. Des choses comme les savons qui n’étaient pas à la bonne place ou le fait qu’il n’y avait pas de comité d’usagers en place. Il n’y avait pas de maltraitance dans l’établissement, le centre a même reçu un agrément avec mention d’honneur.»

Lucie Laplante partage cet avis, se disant ravie de la qualité des soins sur place. «De mon expérience, ça se passait très bien, il y a vraiment une équipe attentionnée qui donnait les soins», indique-t-elle.

En ce qui a trait au rapport attendu, Mme Grenier insiste pour dire qu’il est présentement en rédaction et qu’il ne pouvait être complété durant la pandémie, alors que le vérificateur indépendant n’avait pas accès au lieu.

Un manque à gagner
Par ailleurs, le Groupe Sedna affirme qu’il y a un manque à gagner dans le système actuel de financement des CHSLD. Au CHSLD Valeo, 60 places relèvent du réseau public, et 18 sont privées. 

Selon Mme Grenier, une place en CHSLD coûte entre 7000$ et 8000$, mais le gouvernement accorde à Valeo un financement de 5 000$ pour les places occupées par le public. 

«Le modèle de places privées a mal vieilli, estime-t-elle. En partant, on se retrouve avec un déficit dans les opérations pour donner les mêmes soins. Ça fait plusieurs années qu’on savait qu’on allait devoir rouvrir ce volet lors de la nouvelle entente.»

Elle admet en outre que c’est ce point – plus que la durée du bail – qui dérangeait le Groupe Sedna. Selon elle, ce dernier «n’aurait eu aucun problème à fonctionner avec l’offre des deux ans, qui leur aurait permis de se conformer à la vision ministérielle», alors que le Ministère prévoit uniformiser les pratiques du privé avec celles du publique dans les prochaines années.

La suite des choses
Dans ce contexte, le CISSS de la Montérégie-Centre a lancé un appel d’offres d’urgence pour de la location d’espaces afin d’y opérer de 60 à 100 lits d’hébergement de type CHSLD. Le 28 juin est la date limite pour recevoir les offres.  

Martine Lesage, du CISSS de la Montérégie-Centre, assure que les résidents seront accompagnés «tout au long du processus de relocalisation, si celle-ci est nécessaire. Nous sommes conscients de l’importance de la stabilité du milieu de vie pour les aînés.» 

«Nous comprenons que cette situation puisse amener de l’inquiétude chez les familles et les proches», ajoute-t-elle. 
Le CISSS affirme avoir contacté toutes les familles des résidents occupant des places publiques.

Lucie Laplante a bel et bien reçu une communication du CISSS disant qu’une rencontre sera organisée le 18 juillet prochain, ce qui, selon elle, laisse bien peu de temps pour trouver une solution de rechange pour sa mère. 

«Je n’ai pas le choix, je suis obligée de faire des recherches de mon côté, se résigne-t-elle. Deux mois, c’est bien peu pour trouver une nouvelle résidence adéquate. Je ne peux m’accrocher à ce que le nouvel appel d’offres va peut-être revenir au même bâtiment.»