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Inondations du 9 août : des citoyens à bout interpellent les élus

le mercredi 21 août 2024
Modifié à
Par Sylvain Daignault - Initiative de journalisme local

sdaignault@gravitemedia.com

Des débris, résultats des fortes pluies du 9 août, attendent d’être ramassés le long d’une rue dans l’arr. de Saint-Hubert. (Photo: Le Courrier du Sud – Sylvain Daignault)

Dévastés par les pluies torrentielles du 9 août, de nombreux résidents de Longueuil, le cœur lourd, ont pris la parole lors de la séance du conseil du 20 août. Leurs voix tremblantes, empreintes de détresse, portaient un cri de désespoir qu’ils espéraient voir entendu par les élus.  

Brad Boss a acheté sa maison de la rue Balmoral (arr. de Saint-Hubert) en août 2018. À cette époque, M. Boss a neuf voisins. Mais trois ans plus tard, M. Boss en a 47, «47 nouveaux logements avec le même système d’égout et le même système pluvial».

Le 28 novembre 2019, après avoir rénové sa maison au coût de 153 000 $, un premier incident survient quand les égouts bloquent à l’entrée. «Mon sous-sol que je viens de finir inonde avec 11 pouces d’eau et de déjections humaines. Vous pouvez imaginer!» s’exclame-t-il.

M. Boss attribue ses ennuis à ce qu’il qualifie de «surdensification» de son secteur. Pour lui, il est illogique de remplacer 9 maisons par 47 logements avec des terrains minuscules et recouverts d’asphalte et penser que le réseau pourra recevoir toute cette nouvelle eau. 

Plusieurs citoyens touchés par des inondations ont fait part de leur inquiétude, de leur désarroi et de leur désespoir aux élus de Longueuil. (Photo: page YouTube de la Ville de Longueuil) 

«Vous allez faire quoi? J’ai eu trois inondations en cinq ans. Je ne suis plus assurable. Il n’y a pas de bassin (de rétention), pas de terre. Ça fait 280 000 $ de rénovation dans ma maison et je n’ai rien!», de lancer, proche des larmes, le citoyen en détresse.   

«Elles sont où les limites? de demander M. Boss. Vous vous êtes engagés en 2021, 2022 et 2023 que vous étiez pour refaire la rue. J’attends toujours une réponse de mon conseiller municipal. On est trois. Mes voisins sont là! On est à bout!»


«Je fais un bon salaire, je paie mes taxes. J’attends des actions concrètes pour ne pas perdre mon patrimoine familial! Si je perds mes assurances, je perds mon hypothèque. Si je perds mon hypothèque, je perds ma maison. Je ne veux pas rejoindre les sans-abris à cause de l’inaction de la Ville de Longueuil!» 
- Brad Boss, résidant de la rue Balmoral (arr. de Saint-Hubert) 

Bassin de rétention défectueux?

Inondé même s’il a pompé de l’eau durant trois heures et demie, Pierre Charlebois a signalé que le bassin de rétention de son secteur (des Mufliers) se renversait dans les rues et sur les terrains de son secteur. «L’eau rentrait par le solage de nos maisons, par les quatre coins.»

M. Charlebois questionne l’entretien du bassin de rétention et signale que des castors y ont pris leurs habitudes.  

Perte de valeur et exode
Lucie Gélinas a indiqué que Longueuil faisait partie des quatre villes les plus affectées par les refoulement d’égout au Québec le 9 août et s’est inquiétée de la perte de valeur de sa maison. «Il va y avoir des conséquences sur nos assurances ainsi que sur la valeur de nos maisons. On est conscient que nos maisons viennent de perdre des milliers de dollars avec cet événement-là que l’on doit soumettre par obligation au moment de la vendre.» 

Mme Gélinas poursuit son intervention en demandant pourquoi à Brossard il n’y a pas eu le même impact.

Édouard Beaulieu est père de jeunes enfants. Il veut aujourd’hui quitter la ville avant que sa maison ne soit plus assurable. «Qu’est-ce que la Ville compte faire pour retrouver la confiance de ses citoyens?» a-t-il demandé.

En anglais, Enrique Ferrera a exprimé son désarroi après avoir été inondé une 6e fois. «J’habite au coin de Michigan et Monaco. Je ne sais plus quoi faire! Je ne peux pas vendre ma maison! Vous voulez acheter ma maison? Peut-être que je devrais déménager à Saint-Jean-sur-Richelieu!»

La Ville en mode actif
Visiblement touchée par ces commentaires, la mairesse de Longueuil Catherine Fournier a dit comprendre la colère des gens, «colère qui m’anime aussi dans le travail qu’on a à accomplir auprès de vous, nos concitoyens.» 

Mme Fournier a rappelé que les événements extrêmes sont en augmentation partout au Québec et a assuré les sinistrés que les équipes responsables du dossier des inondations allaient entendre leurs commentaires et vérifier les situations particulières.

La mairesse de Longueuil, Catherine Fournier. (Photo: page YouTube de la Ville de Longueuil)

La mairesse a rappelé que 30 ou 40 mm de pluie peuvent faire la différence et expliquer pourquoi certains secteurs sont touchés alors que d’autres sont épargnés, avant d’indiquer que des secteurs à risques avaient été identifiés et que des mesures seraient bientôt prises afin de corriger la situation. 

Elle a également rappelé que la Ville avait interpellé le Bureau d’assurance du Canada afin que l’assurabilité des gens soit maintenue en cette période de changements climatiques. «On est pleinement engagé et on ne ménagera aucun effort, a-t-elle assuré. C’est notre priorité.» 

Leader de la majorité, Jonathan Tabarah a indiqué que les élus avaient adopté plus tôt en journée le dernier Plan triennal d’immobilisations pour déterminer où et quand se feront les infrastructures. «On travaille aussi sur un PDI, un plan de déploiement des infrastructures sur dix ans, afin d’avoir une meilleur prévisibilité sur nos infrastructures. […] Je vous invite à faire attention; ce n’est pas parce que c’est écrit dans le PTI que ça va se faire exactement à ce moment-là, mais ça donne un horizon de temps.»

M. Tabarah a fait allusion aux travaux gigantesques qui devront être faits partout au Québec afin de s’acclimater aux changements climatiques en soulignant que plusieurs zones jadis identifiées comme inondables aux cent ans sont devenues des zones inondables aux vingt ans et deviendront peut-être des zones inondables aux dix ans. 

«Ces cas de figure ne vont pas arrêter. C’est à nous tous de s’adapter et d’améliorer nos infrastructures, évoque-t-il. On parle de milliards à travers le Québec.» 

M. Tabarah a ajouté que ce n’est pas parce qu’il n’y a pas de travaux visibles que rien ne se fait à l’interne. Ainsi, des équipements sont présentement installées afin de collecter les données les plus précises quand survient de fortes pluies. 

«Éventuellement, les résultats seront au rendez-vous», a-t-il assuré. 

En attendant, une collecte de débris était planifiée le mardi 20 août. «Selon l’avancement de la collecte sur le territoire, celle-ci pourrait s’étendre jusqu’au vendredi 23 août», peut-on lire sur le site de la Ville.