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Les enfants de novembre 1984 : Stéphan Parent se penche sur des cas non-résolus

le mercredi 08 novembre 2023
Modifié à 16 h 37 min le 07 novembre 2023
Par Sylvain Daignault - Initiative de journalisme local

sdaignault@gravitemedia.com

Cinéaste au long court, Stéphan Parent s’intéresse depuis toujours aux disparitions d’enfants. (Photo: Le Courrier du Sud – Gracieuseté)

Le cinéaste d’enquête Stéphan Parent se passionne pour la reconstitution de cas vécus inconnus ou oubliés du grand public. Il vient de publier aux éditions JCL Les enfants de novembre 1984, un ouvrage qui revient sur les enlèvements simultanés de Sébastien Métivier, Wilton Lubin et Maurice Viens le 1er novembre 1984 et sur celui de Denis Roux-Bergevin en juin 1985. 

Le 1er novembre 1984 vers 17h, Wilton Lubin, 12 ans, et Sébastien Métivier, 8 ans, quittent leur résidence respective rue Desjardins dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve pour se rendre à un cours de bricolage non loin de chez eux. Les deux amis disparaissent. 

La même journée, un autre enlèvement se produit, cette fois rue Dorion dans le quartier Centre-Sud quand Maurice Viens, 4 ans, disparait mystérieusement.   

«J’avais 14 ans au moment de ces disparitions. Ça m’a marqué», affirme Stéphan Parent qui se souvient avoir participé aux recherches dans son quartier. 

Découvertes macabres
Le 6 novembre, on retrouve le corps affreusement mutilé du jeune Maurice Viens dans la cave d’une maison abandonnée, dans le rang Mgr-Gravel, à Saint-Antoine-sur-le Richelieu. Puis, le 2 décembre, la dépouille de Wilton Lubin qui est repêché sur les berges du fleuve Saint-Laurent, à l’Île Charron (Longueuil). Il a été victime d’un meurtre. 
Quant à Sébastien Métivier, il n’a toujours pas été localisé. Son dossier est sous la responsabilité du Service de police de la Ville de Montréal.

Le Courrier du Sud avait couvert la découverte du corps de Wilton Lubin à l’île Charron. (Photo: Le Courrier du Sud – Archives)>

Denis Roux-Bergevin
Le mercredi 5 juin 1985, le jeune Denis Roux-Bergevin est enlevé à Côte-Saint-Paul. Trois jours plus tard, le cadavre du jeune garçon de 5 ans est découvert par un promeneur dans un boisé de Brossard, à environ 150 mètres de l’autoroute 10, non loin d’où se trouve le Quartier DIX30 aujourd’hui.

Le corps de Denis Roux-Bergevin avait été découvert à Brossard. (Photo: La Presse, 9 juin 1985, p. 3 – BAnQ)

«Il y a beaucoup de similitudes dans les cas de Maurice Viens et Denis Roux-Bergevin. Les deux ont été enlevés tôt en soirée, dans une ruelle qui donne un accès rapide à une autoroute, indique M. Parent. Et dans les deux cas, un vêtement a été retrouvé avant qu’on découvre les corps des deux malheureux qui semblent avoir été battus de la même façon.»    

En 2016, les policiers affirment en grande pompe avoir résolu le meurtre de Denis Roux-Bergevin. Il s’agit selon eux de Jean-Baptiste Duchesneau, un homme au lourd passé criminel, qui s’est suicidé la veille de la journée où il devait passer un test de polygraphe. 

Stephan Parent n’y croit pas. 

Suspects
Selon l’expert, les policiers avaient très tôt dans leur ligne de mire des suspects très sérieux : Claude Quévillon, chauffeur de taxi, son colocataire Marc Perron, Serge Gallien et Jean-Baptiste Duchesneau. «Ils avaient tous de lourds casiers judiciaires ou psychiatriques, rappelle M. Parent. Quévillon a même été arrêté et questionné par les policiers le 14 novembre 1984.»

Aujourd’hui, seuls Serge Gallien et Marc Perron sont en vie. 

M. Parent a l’impression que les policiers de l’époque ont hésité à porter des accusations en raison du statut de « débiles mentaux » – c’est ce qu’on disait à l’époque – de ces suspects. «Mais surtout, je pense que les enquêtes ont été bâclées. Il y avait à l’époque un manque de collaboration entre les corps de police en plus d’une mauvaise lecture de la loi concernant les cas psychiatriques.» 

Avancées génétiques
Le cas de Sharron Prior, résolu récemment par le Service de police de l’agglomération de Longueuil (SPAL), fait dire à M. Parent que plusieurs autres cas de meurtres d’enfants seront résolus grâce aux avancées en matière de génétique. 

En mai dernier, le SPAL annonce avoir résolu un meurtre vieux de 48 ans. Sharron Prior, 16 ans, de Pointe Saint-Charles, a été enlevée le 29 mars 1975. Son corps est retrouvé trois jours plus tard, le 1er avril, dans un terrain vague du secteur Jacques-Cartier, près de la rue Adoncour, à Longueuil. 

Une percée scientifique dans le domaine de la généalogie génétique a permis d’établir un lien entre l’ADN prélevé sur une pièce à conviction et celui du suspect, Franklin Romine, décédé en 1982 et enterré aux États-Unis. 

Mais encore faut-il avoir gardé les pièces à conviction. «L’autopsie du jeune Lubin a démontré qu’un couteau de style Rambo avait été utilisé, indique M. Parent. Or un tel couteau avait été découvert dans l’appartement que de partageaient Quévillon et Perron en plus d’un scrapbook contenant des articles de journaux reliés aux disparitions d’enfants. Mais ce couteau est aujourd’hui disparu», déplore M. Parent. 

En 2019, Stephan Parent faisait paraître Sur les traces de Cédrika Provencher, toujours aux Éditions JCL. L’auteur sera présent au Salon du livre de Montréal le dimanche 26 novembre.