Les organismes d'alphabétisation crient famine
COMMUNAUTAIRE. Flanqués des députés de Marie-Victorin et de Vachon, des représentants des cinq groupes formant la Concertation Alphabétisation Longueuil (CAL) ont interpellé le gouvernement, le 22 février, afin qu'il vienne en aide aux organismes luttant contre l'analphabétisme.
La CAL, qui épaule près de 200 individus et familles, et le Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec (RGPAQ), qui comprend 128 organismes, estiment que le manque à gagner des groupes en alphabétisation est de 9 M$, eux qui disposent actuellement d'un budget de 12,8 M$.
Choix déchirants
«On doit faire des choix difficiles chaque année parce qu'on n’est pas capable de répondre aux besoins, déplore la coordonnatrice au Fablier, Sonia Desbiens. On doit limiter les heures d'ouverture ainsi que notre personnel. Il n'y a eu aucune indexation à notre budget, donc, nos revenus stagnent alors que nos dépenses augmentent.»
«Déjà que venir ici pour demander de l'aide, c'est un gros pas pour ces gens-là, c'est inconcevable qu'on ait à en refuser à cause d'un manque de budget», ajoute-t-elle.
D'autant plus que la lutte contre l'analphabétisme est bien loin d'être gagnée, selon les différents intervenants du milieu, alors que la demande est sans cesse grandissante.
«L'analphabétisme est un problème majeur encore en 2015, alors que plus d’un million de personnes, soit 19% de la population, éprouvent d'importantes difficultés avec l'écrit et sont considérées comme peu alphabétisées», indique Mme Desbiens.
Cette mobilisation signifie le début d'une lignée d'actions qui suivront à travers le Québec par le RGPAQ.
Travail souligné mais pas récompensé
L'un des reproches de la CAL envers le gouvernement est son manque de cohérence à l'égard des organismes d'alphabétisation.
Alors que ceux-ci sont de plus en plus dépourvus de moyens, une motion acceptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale en septembre dernier visait à faire reconnaître l'ampleur de l'analphabétisme dans la province et soulignait le travail des différents groupes luttant contre le phénomène.
L'implication de députés régionaux comme Bernard Drainville et Martine Ouellet est essentielle à ce que la voix de ces organismes soit entendue, croient-ils.
«C'est certain que vous pouvez compter sur notre appui, a approuvé la députée de Vachon. Les médecins ont droit à 800 M$ de salaire en trop, et ici, on a besoin de quelques millions et ça a l'air d'être difficile…»
«Quand on investit dans l'alphabétisation, on investit dans l'être humain, dans sa réussite personnelle et scolaire. On lui donne, à cette personne-là, un moyen de devenir un citoyen qui va pouvoir donner le meilleur de lui-même au reste de la société», a fait valoir le député de Marie-Victorin.
Chaise musicale
Les groupes devront diriger leurs demandes vers de nouvelles oreilles puisque le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche à qui était dirigée cette interpellation, Pierre Moreau, n'est plus en poste, lui qui serait possiblement atteint d'un cancer.
Difficile toutefois de se faire entendre alors que ministère de l'Éducation est synonyme d'instabilité depuis plusieurs années. Sébastien Proulx, qui était déjà à la tête du ministère de la Famille, est le nouveau titulaire de l'Éducation, devenant ainsi le cinquième à occuper ce poste en moins de deux ans.
C'est donc vers lui que seront vraisemblablement dirigées les prochaines actions de mobilisation du CAL et du RGPAQ, qui entendent poursuivre ces mesures au cours des prochains mois.
Une demande de rencontre a été logée auprès du ministère par le RGPAQ, qui est toujours en attente de réponse.