Les rosicruciens de Longueuil dévoilent un peu de leurs mystères

RENCONTRE. La loge Poséidon de l'Ancien et mystique Ordre de la Rose-Croix (AMORC) de Longueuil ouvrait ses portes au public pour sa soirée d'information mensuelle, le 11 octobre. Le Courrier du Sud était au rendez-vous.
Surplombées par un sceau évoquant les symboles hiéroglyphiques égyptiens, les portes closes de l'AMORC intriguent d'emblée le visiteur.
Accueillis par Denis, cadre à la retraite et membre de l’Ordre depuis plusieurs dizaines d'années, nous pénétrons dans l'enceinte spacieuse de la salle d'accueil de la loge Poséidon. Deux autres membres, Pascal, professeur d'université, et Marie-France, naturopathe, nous invitent à prendre place.
Au programme de la soirée: deux vidéos de présentation de la Rose-Croix. La salle est vide. Les membres indiquent cependant que la fréquentation fluctue d'un mois à l'autre. Il peut ainsi venir jusqu'à six personnes à cette séance, selon eux.
En guise de présentation des valeurs de la Rose-Croix, Denis nous raconte son parcours au sein de cet ordre hermétiste – courant de pensée cultivant les mystères, les rites et les symboles.
«Ici, lance-t-il, nous cultivons la tolérance, l'indépendance et l'entraide. Chacun est libre, car la démarche est avant tout personnelle. L'AMORC nous propose une façon de voir la vie en améliorant nos qualités profondes.»
Une fois les vidéos visionnées, nous sommes invités à visiter la bibliothèque et le temple. Orné de divers symboles rappelant une fois de plus l'ancienne Égypte et d'une grande croix percée d'une rose rouge – symbole de l'AMORC –, le temple revêt un caractère sacré. Seuls les initiés, parés d'un tablier rosicrucien, peuvent assister aux différents rituels qui se déroulent dans ce lieu de recueillement. Nous n'avons d'ailleurs pas été autorisés à prendre de photos du temple.
Secret ou sujet tabou?
Pour les membres de l'AMORC, évoquer leur appartenance à la Rose-Croix dans leur vie de tous les jours reste difficile, non pas parce qu'ils sont frappés par l'interdit de se dévoiler, mais bien parce qu'ils disent ressentir une certaine forme d'incompréhension et de rejet de la part de l'extérieur.
C'est le cas de Denis. Ce dernier occupait un haut poste de direction dans un groupe de télécommunications renommé.
«Au travail, on n’en parle pas, se rappelle-t-il. Je suis certain que l'on pourrait perdre son poste. Simplement dire aux autres que l'on a une démarche spirituelle, c'est dur; on perd souvent toute crédibilité. Vous êtes tout de suite catalogué», relate-t-il.
Le retraité, qui a intégré les rangs de l'AMORC dans sa jeunesse et partage cette activité avec son épouse, confie n'en parler qu'à certains proches ou à «des gens ouverts à la discussion».
«La Rose-Croix, c'est ce qui me convenait, explique-t-il. Mais chacun doit trouver sa voie et faire son propre cheminement. Moi, ça m'a permis de m'accepter et d'être heureux.»
Pour Pascal et Marie-France, le constat est le même. «Nous restons discrets sur nos activités, complète Marie-France. Nous ne sommes pas là pour nous exposer, mais pour aider.»
La loge Poséidon de Longueuil compte environ 65 membres qui se réunissent, selon leur gré, deux samedis dans le mois. Aucune présence n'est obligatoire.
Dédiaboliser la mystique rosicrucienne
Alors, religion? Société secrète? Secte? Au même titre que la franc-maçonnerie, la Rose-Croix suscite bien des fantasmes et des questionnements.
Néanmoins, à en croire ses membres, la Rose-Croix n'aurait pas d'autre vocation que d'inviter les individus à «s'interroger sur le sens de leur vie et à travailler sur eux-mêmes afin de rendre l'humanité meilleure».
Par la méditation, le respect de la vie, la fraternité, l'étude des lois de l'Univers et le développement des vertus individuelles, les adeptes entament un long processus introspectif les entraînant sur le chemin de ce qu'ils nomment «l'éveil de la conscience».
Apolitique et non religieux, la Rose-Croix semble donc bien loin des dogmes et du prosélytisme; elle se considère d'ailleurs comme un mouvement philosophique, initiatique et traditionnel. On compte en outre des rosicruciens célèbres, comme la chanteuse Édith Piaf, le pianiste Éric Sati ou les philosophes Leibniz et Spinoza.
Ouvert aux hommes comme aux femmes, sans distinction de race, de nationalité, de classe sociale ou de religion, l’AMORC rappelle ainsi qu'elle est une «École de liberté» et que «la pratique rosicrucienne n’a rien d’obligatoire ou de contraignant».
Si les rosicruciens du 17e siècle déclaraient posséder la pierre philosophale, les secrets des dieux, la Médecine universelle ou encore l'Élixir de jouvence, aujourd'hui, la quête semble davantage symbolique.
Les adeptes sont initiés puis étudient chez eux, chaque semaine, des monographies renfermant une connaissance qui serait héritée de l'ancienne Égypte, des soufis, des Templiers et des alchimistes. Différents thèmes y sont abordés, comme la projection astrale, la réincarnation, la médiation, les lois naturelles, la science des nombres et des symboles. Les avancées scientifiques tiennent une place importante au sein de l'AMORC, qui possède d'ailleurs sa propre université: L'Université Rose-Croix internationale (URCI).
Pour ceux qui ressentent le besoin de partager leurs expériences, ils peuvent se rendre dans des loges, comme celle de Longueuil. Il en existe dix au Québec. Toutefois, selon les membres de l'AMORC, seulement 30% des rosicruciens se rendraient dans une loge pour suivre leurs enseignements.
Notons également que pour adhérer à l'AMORC, il faut avoir atteint la majorité légale et remplir une demande d’affiliation en ligne. Il en coûtera environ 200$ par année. Une adhésion de 20$ par mois est demandée pour les membres souhaitant fréquenter la loge.
Conférence sur la solitude: l'URCI donnera une conférence, le 21 octobre, à 19h30, à la loge Poséidon, située au 707, rue Préfontaine.
Rens.: www.rose-croix.qc.ca/ps4 ou poseidon@rose-croix.qc.ca