Pandémie ou pas, les banlieues gagnent en popularité
Le phénomène s’observe un peu partout en Amérique du Nord, et probablement ailleurs dans le monde. En matière d’immobilier, autant résidentiel que commercial, la pandémie contribue à un exode vers les banlieues. Prenez les plus récents chiffres sur les ventes de résidences dans le Grand Montréal, présentés le 6 août, par l’Association professionnelle des courtiers immobiliers du Québec (APCIQ). En juillet, on a enregistré 5 356 ventes, un sommet historique, en hausse de 46% par rapport à la même période l’an passé, et une conséquence évidente de la reprise des activités après le confinement du printemps. Une analyse plus poussée de ces données signale une tendance intéressante: les plus fortes progressions ont été observées à l’extérieur de l’île de Montréal: 84% pour la Couronne nord, 65% pour Vaudreuil Soulanges, 41% pour la Rive-Sud et 31% sur l’île. Il apparaît clair que l’élan n’est pas aussi prononcé dans la métropole elle-même et non seulement en raison des nombreux cas de COVID-19 qui n’ont pas aidé à son image. Les innombrables chantiers et les problèmes de circulation ont dû refroidir des acheteurs, sans compter les changements de configuration des rues commerciales qui mécontentent autant des marchands que des résidents. Il faut aussi prendre en compte la montée du télétravail, qui devrait perdurer même après la fin de la pandémie. Si vous pouvez travailler de chez vous, il y a moins d’intérêt à habiter pas trop loin des centres-villes et des édifices à bureaux. En passant, on note des mouvements similaires dans d’autres grandes villes nord-américaines, à Toronto ou à New York, par exemple. Le réputé commentateur américain Robert Shiller, prix Nobel en économie, disait il y a un mois qu’il entrevoit de ce fait un déclin des centres-villes et une popularité accrue des banlieues. C’est pareil pour le secteur commercial, encore que dans ce cas, le portrait soit plus complexe. La situation de Montréal est particulière du fait des entraves qui se multiplient dans de grandes zones marchandes, et des stationnements qui, eux, se raréfient. Mais, autrement, les centres commerciaux traditionnels traversent une mauvaise passe qui risque de se prolonger. On comprend l’importance des mesures sanitaires, mais que le flânage soit découragé n’aidera pas. Il devient même difficile de trouver des banquettes où s’asseoir au cœur des mails commerciaux. Et comme bien des chaînes ont succombé à la pandémie, les espaces vides et les affiches à louer n’améliorent pas l’atmosphère. De toute façon, le succès d’une formule comme celle du Quartier DIX30 a déjà montré que bien des gens ne trouvent plus nécessaire de se rendre en plein centre-ville. D’autres établissements du genre vont suivre. Et il serait téméraire de croire que ce n’est là qu’un phénomène passager.