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Vols paraboliques : Longueuil, lieu de test pour la médecine dans l’espace

le mercredi 11 septembre 2024
Modifié à 15 h 33 min le 12 septembre 2024
Par Michel Hersir

mhersir@gravitemedia.com

Le Falcon 20 est un avion à réaction du Conseil national de recherches du Canada qui permet d’effectuer des vols paraboliques. (Photo: Gracieuseté – CNRC)

Il y aura un peu de Longueuil dans la mission Artemis II de la NASA, qui doit amener quatre astronautes dans la capsule Orion en orbite autour de la Lune. Et il pourrait y avoir un peu de Longueuil dans des missions à plus long terme, comme celles qui enverraient pour la première fois des humains vers Mars.

L’Agence spatiale canadienne (ASC) a tenu une série de vols paraboliques à Longueuil du 15 au 19 juillet; une campagne centrée sur la santé des astronautes, afin de tester différentes technologies.

Ces vols permettent de simuler un environnement de microgravité, comme celui auquel les astronautes sont confrontés dans leurs missions.

«C’est un vol où l’on va faire des paraboles, soit des hauts et des bas. On peut imaginer comme une montagne russe. Rendu au haut de la parabole, on tombe en chute libre, l’avion chute du ciel carrément et c’est là qu’on vit un 20 secondes de microgravité», explique Tristan Richmond, responsable de l’innovation spatiale pour l’équipe Nouveaux horizons en santé de l’ASC.

Huit vols ont été effectués en juillet, au cours desquels 18 paraboles par vol ont été réalisées.

Si l’expérience peut donner le tournis, admet M. Richmond, elle offre aussi une occasion unique de simuler un tel environnement sans aller dans l’espace.

L’entraînement dans l’espace

Parmi les tests effectués, on retrouve celui sur un appareil d’entraînement : la roue d’inertie. Il s’agit d’un appareil qui existe sur Terre et qui est utilisé principalement sur le plan de la puissance et de la réhabilitation.

«Nous, l’objectif, c’est vraiment de l’utiliser dans plusieurs stimulus d’entraînement, en pensant à la manière dont les astronautes s’entraînent dans la station spatiale. Ils ne font pas seulement de la masse musculaire, ils ne font pas juste de l’entraînement en résistance, mais ils font aussi du cardio», indique Yannick Laflamme, assistant aux opérations en santé de l'espace.

Avant de l’intégrer pour la mission Artemis II, l’appareil a fait l’objet de tests à l’ASC, puis au cours des vols paraboliques.

«En termes d’objectifs primaires, on voulait tester si c’était faisable, si le mécanisme de la roue d’inertie fonctionnait bien. Et on a eu des résultats très positifs par rapport à ça», souligne M. Laflamme.

La microgravité sur le corps

Garder la forme est crucial pour les astronautes et chacun des quatre participants à la mission Artemis II aura un 30 minutes par jour dédié à l’entraînement.

«C’est sûr que pour la mission Artemis II, qui dure 10 jours, on n’est pas très préoccupé au niveau physiologique. Ça nous permet quand même d’essayer la roue d’inertie pour une première fois, voir ce qui va bien ou pas bien», souligne M. Laflamme.

C’est toutefois une autre histoire pour les missions à plus long terme, où les effets physiologiques sont importants.

Parmi ceux-ci, il y a des effets sur les plans sanguin, cérébral, musculaire et osseux.

M. Laflamme donne en exemple l’importance de l’entraînement pour les jambes : «dans leur quotidien, ils n’ont pas besoin de se supporter». Ou encore des effets sur le plan vestibulaire et de la proprioception, alors que la gauche, la droite, le haut et le bas n’existent plus vraiment dans l’espace.

Il évoque en outre les problèmes en lien avec les os.

«Une personne normale en haut de 50 ans va perdre environ 1% de densité osseuse par année. Quand on regarde les astronautes, c’est 1,5% environ par mois dans l’espace. Ça, c’est un des grands problèmes qu’on essaie de résoudre avec le fait de vivre en microgravité», explique-t-il.  

Mission vers Mars

Différents groupes ont participé à la campagne des vols paraboliques. Celui dont Yannick Laflamme fait partie poursuivait des objectifs concernant des missions à court et moyen terme.

Celui de Tristan Richmond, Nouveaux horizons en santé, testait plutôt des technologies, comme l’application créée par un médecin de l’hôpital Charles-Lemoyne, pour des voyages à plus long terme.

«On peut penser à, disons, les missions vers Mars. Un aller-retour vers Mars, c’est plus d’un an et demi de voyagement. On doit imaginer comment cette microgravité va impacter sur le long terme. […] Donc ces vols-là sont aussi utiles pour nous dans la perspective où on peut commencer à comprendre quels sont les requis, les défis de l’utilisation de prototypes, comparés à des appareils de référence, dans un contexte de microgravité», indique-t-il.

Il s’agissait pour l’Agence spatiale canadienne d’une première collaboration avec le Conseil national de recherches du Canada afin de réaliser ce type de vol à Longueuil. Une expérience que Yannick Laflamme et Tristan Richmond seraient heureux de répéter.

«Si on pouvait avoir ça chaque année, ce serait super pour nous!» assure M. Richmond.