Motel Oscar : l’enseigne pourrait vivre plus longtemps que le bâtiment

D’ici quelques années, un projet immobilier devrait voir le jour sur le terrain du motel Oscar. Son enseigne, toutefois, pourrait survivre, à son emplacement actuel ou ailleurs. C’est dans cette optique que la Ville de Longueuil a mandaté la coopérative Passerelles pour réaliser une étude patrimoniale sur l’enseigne, qui marque le paysage du boul. Taschereau depuis plus d’un demi-siècle.

L’enseigne du motel Oscar est la plus vieille en son genre encore debout sur la grande artère. À une autre époque, elle aurait été retirée sans créer de vague. Aujourd’hui, on souhaite lui donner une nouvelle vie. 

«Elle a une certaine identité, un ressenti chez les citoyens de Longueuil. Beaucoup l’aiment, se prennent en photo avec. Les plus anciens se remémorent des souvenirs, d’autres la connaissent pour le nombre de films produits là-bas. Même des gens en dehors du territoire viennent spécialement pour une photo avec elle», souligne Stéphanie Briaud, conseillère en développement culturel pour la Ville de Longueuil.

Si l’attachement à l’enseigne est connu, elle n’avait toutefois jamais fait l’objet d’une étude patrimoniale. 

«Le patrimoine commercial, c’est un enjeu qui est arrivé au Québec seulement dans les dernières années. On n’avait donc pas de méthode là-dessus, alors on a mandaté une firme pour faire l’évaluation», poursuit Mme Briaud.
Le propriétaire a d’ailleurs accepté de ne pas toucher à l’enseigne en attendant les résultats de l’étude.

Sensibilité

Cette étude d’une enseigne en particulier est donc une première pour la Ville de Longueuil. 

Stéphanie Briaud estime que le cas de l’enseigne d’Archambault à Montréal – qui restera malgré la fermeture du magasin – «a tout démarré» dans la protection de ce patrimoine.

«On voit que certaines municipalités ou arrondissements ont un peu plus de sensibilité à les conserver», affirme-t-elle, précisant en outre que cela vient naturellement avec des discussions avec les propriétaires, alors qu’il s’agit en majorité de patrimoine privé.

Longueuil souhaiterait par ailleurs faire l’inventaire de ses enseignes commerciales, un peu à l’image du Plateau Mont-Royal. Ce dernier a de plus adopté un règlement pour protéger ses enseignes «à intérêt».

«C’est un élément identitaire du secteur et les gens y sont attachés.»
–Frédérique Gagné-Thibault, chargée de projet chez Passerelles

La même depuis 1966

Frédérique Gagné-Thibault, chargée de projet chez Passerelles, explique que ces enseignes étaient nombreuses sur le boul. Taschereau dans les années 60.

«Selon certaines études, le boul. Taschereau c’était un peu la strip de Las Vegas, mais du Québec. Il y avait un affichage comme ça de type néon latéral tout au long du boulevard» relate-t-elle.

(Photo : Le Courrier du Sud - Denis Germain)

Les motels étaient également nombreux sur l’artère. Leurs enseignes ont toutefois, pour la plupart, disparu. 

«On en retrouve encore, mais plus sous leur forme originale des années 50, 60. Alors que celle du motel Oscar, on a trouvé plusieurs vieilles photos, et ç’a toujours resté très similaire, outre la couleur de la peinture ou ce qui était dans les petites boîtes réservées à l’affichage», note Mme Gagné-Thibault.

«En soi, elle n’a pas changé, c’est la même depuis 1966», ajoute-t-elle.

Un entretien avec Raymond Boudreau, fils d’Oscar Boudreau, qui a construit le motel en 1949, lui a en outre appris l’origine de l’enseigne actuelle. 

«Il était devant le motel un été avec son père et il a dit : "je pense qu’on devrait mettre une nouvelle enseigne, la mettre au goût du jour". Ils ont fait affaire avec quelqu’un du coin, M. Patenaude, qui faisait des enseignes, l’ont sketché ensemble vite vite et c’est ça qui a été installé», témoigne-t-elle.

Recommandations

Maintenant, est-ce que l’enseigne pourrait être conservée sur place? C’est une discussion qu’il y aura à avoir avec le propriétaire, explique Stéphanie Briaud, qui précise que celui-ci a également hâte de voir les recommandations de Passerelles.

Sur la base de celles-ci, la Ville envisagera ensuite les actions de conservation possibles, même si la déplacer risquerait de la fragiliser, admet la conseillère en développement culturel.

Dans tous les cas, son avenir sera suivi de près par les citoyens. 

«On en a perdu des enseignes proches et c’était la même chose, les gens avaient d’anciennes photos qu’ils partageaient sur les réseaux sociaux, en discutaient, etc. Il y avait un hôtel juste à côté avec une énorme enseigne et quand elle est partie, ç’a engendré un certain émoi. C’est un peu ça qu’on aimerait éviter pour le motel Oscar», indique Mme Briaud.