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Peut-être des barrières antisuicides… dans deux ou trois ans, minimum

le mardi 12 mars 2024
Modifié à 11 h 42 min le 12 mars 2024
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

L’ajout de peinture anti-escalade fait aussi partie des mesures envisagées. (Photo: Le Courrier du Sud - Denis Germain)

Si Infrastructure Canada (INFC) confirmait l’installation de nouvelles barrières antisuicides sur le pont Samuel-De Champlain, il faudrait calculer un délai de deux à trois ans, à partir de ce moment, avant qu’elles n’apparaissent sur la structure, selon Signature sur le Saint-Laurent. Et l’heure est présentement à l’évaluation.

INFC évalue en ce moment la possibilité d’ajouter des barrières dissuasives sur le tablier autoroutier du pont et de modifier les barrières existantes le long de la piste multifonctionnelle.

«En tenant compte des entraves requises, des autres travaux qui doivent avoir lieu sur le pont, notamment des travaux de planage-pavage et des travaux des autres chantiers majeurs dans la grande région de Montréal, nous pouvons parler d'un délai estimé de 2-3 ans à partir du moment où une confirmation serait donnée par INFC», avance Martin Chamberland, directeur des opérations de Signature sur le Saint-Laurent. 

Il faudrait tenir compte des étapes de conception, d’approvisionnement, ainsi que d’installation et de mise en place.
INFC affirme de son côté que davantage d’informations sur les mesures et échéanciers seront transmises «dès que nous serons en mesure de le faire».

Quant à la modification de la clôture existante le long de la piste multifonctionnelle, «une analyse est en cours pour déterminer comment [elle] pourrait être bonifiée sans compromettre la capacité à réaliser les activités d'entretien», soutient M. Chamberland.

L’ajout de peinture anti-escalade fait aussi partie des mesures envisagées et de la signalisation de prévention du suicide sera installée «dans les mois à venir», signifie-t-on. 

«C’est trop long»

Ce discours choque au plus haut point Kathy Roussel. Son fils Maxime s’est enlevé la vie en sautant du pont, le 3 février. Elle craint que les statistiques ne continuent d’augmenter au cours de l’année. 

«On est toujours dans l’hypothétique, les réflexions, les préoccupations, déplore-t-elle au Courrier du Sud. C’est trop long.»

D’autant plus qu’elle n’est pas la première à se faire entendre. Deux coroners ont recommandé de rendre impossible l’escalade de la rambarde de la travée sud et celle de la clôture longeant la piste cyclable.

Mme Roussel comprend mal qu’un pont neuf n’ait «pas été protégé» à sa construction, alors que d’autres structures, au Québec et ailleurs, sont sécurisées.

Sur le pont Samuel-De Champlain, «c’est d’une facilité désarmante. On le voit sur Google Street View, commente la femme de la région de Québec. Ce n’est pas compliqué, sur la travée sud, tu te stationnes, et il manque juste l’affiche «Sautez ici»! Ce n’est pas haut, la rambarde.  Je ne sais pas pourquoi ils ont sécurisé juste le nord.»

Maxime habitait depuis plus de trois ans sur la Rive-Sud. Il était apprenti-électricien à Montréal. Quelques jours avant la date fatidique, il venait d’avoir 27 ans.

Le 3 février, Mme Roussel l’attendait pour souligner son anniversaire. «Je ne sais pas ce qui s’est passé dans la semaine, mais… il ne s’est pas pointé.»

Après avoir témoigné à La Presse, Mme Roussel ose cette deuxième sortie publique pour faire pression sur les décideurs. 

«J’ai de la peine, c’est bien certain, c’est mon fils unique. Je n’ai plus d’enfant, vivant, dit-elle avec émotions. Mais si chaque fois qu’il arrive un drame, un membre de la famille sortait, pour briser le tabou du suicide et faire de la sensibilisation, on serait peut-être en travaux préparatoires [pour des barrières] en ce moment.» 

Nombre «faible» de suicides

Au moins deux suicides se sont produits sur la travée sud du pont. (Photo: Le Courrier du Sud − Denis Germain)

Le nombre total annuel de suicides fait partie des critères pris en considération dans la décision d’ajouter ou non des barrières dissuasives. La Presse révélait récemment que sept suicides et cinq tentatives y sont survenus depuis l’inauguration.

Selon M. Chamberland, la moyenne est d’un événement par an, «si on fait abstraction de l'année 2021, où nous avons eu un plus grand nombre d'événements possiblement liés à la COVID».

«Évidemment, un événement est toujours de trop, ajoute-t-il. Statistiquement, ce nombre demeure faible en comparaison avec les plus ou moins 20 événements par année qui se produisaient au pont Jacques-Cartier avant l'installation des clôtures.»

SSL évoque aussi divers enjeux à prendre en considération pour l’ajout de tels équipements. «Il est plus compliqué de venir ajouter des éléments après la construction lorsque que le pont est en service que lors de la phase initiale de construction.»

De telles barrières n’ont pas été aménagées lors de la construction du pont Samuel-De Champlain, car le pont d’origine ne présentait pas d’historique de suicide.  

Actuellement, seul un côté du corridor nord est protégé par une clôture dissuasive. Pour protéger l’entièreté du pont, des barrières devraient être ajoutées à gauche en direction nord, ainsi qu’à gauche et à droite en direction sud.

En cas de besoin, contacter la ligne téléphonique provinciale de prévention du suicide 1 866 APPELLE (277-3553).