Il y a 75 ans, le 15 décembre 1950, le Théâtre Vox ouvrait officiellement ses portes à Ville Jacques-Cartier. Comme il se doit, Le Courrier du Sud était sur place pour couvrir l’événement.
Dans le style de l’époque, le journaliste Jos. E. Côté raconte le déroulement de la soirée d’ouverture : «Vendredi dernier le 15 décembre, M. L.-P. Barcelo, président de » Le Théâtre Vox Limitée « , recevait dans sa nouvelle salle de vues animées située au No 575 Coteau Rouge, les autorités municipales, dans la personne de son Honneur le Maire René Prévost, les échevins, le député Redmond Roche, le personnel de l’hôtel de ville, le département de la police, les membres de la Chambre de Commerce et plusieurs amis, pour l’inauguration officielle de cette nouvelle salle.»
La particularité du Théâtre était son plafond en demi-cercle. (Photo: Société historique et culturelle du Marigot)

Au programme : «la vue en couleur » When My Baby Smiles at Me « , où Betty Grable et Dan Daily nous entretiennent tour à tour de leur élégantes danses, jointes à une musique des plus entrainantes».
«Après le spectacle, un buffet fui servi et tous et chacun après le régal musical de l’esprit se désaltéra aves sa liqueur favorite qui fut distribuée sans compter. Des photographies furent prises pour commémorer cette belle soirée et tous s’en retournèrent dans leur foyer avec cette conviction qu’ils venaient de passer une des plus belles soirées de leur vie», poursuit le journaliste.
Des programmations antérieures publiées dans Le Courrier du Sud plusieurs mois avant la date de l’ouverture officielle nous indiquent que les cinéphiles fréquentaient les lieux depuis un certain temps. Avec son plafond en demi-cercle, le Théâtre VOX connaitra de belles années avant sa fermeture au milieu des années 1970.
Passe-temps peu coûteux à l’époque — on pouvait encore y voir deux films pour 25 cents à la fin des années 1960 —, le Théâtre VOX s’inscrivait dans la lignée des nombreux cinémas de quartier qui animaient alors la Rive-Sud :
- à Saint-Lambert, le Victoria (env. 1925-1960) et l’Astor (env. 1936-1967);
- à Longueuil, l’Avalon (env. 1950-1970), devenu plus tard Le Charlot (env. 1974-1980), ainsi que Le Petit Theater (env. 1950) et le Rio, au 103, rue Saint-Charles (env. 1950-1962) ;
- à Montréal-Sud, le Dieppe, au 436, rue Sainte-Hélène (env. 1950-1956) ;
- à Greenfield Park, le Makayville (env. 1950) et le Met (env. 1950-1955) ;
- et à Ville Jacques-Cartier, le Royal (env. 1950-1960).
Ces petits cinémas où l’on allait en famille ou entre amis, un cornet de popcorn à la main, ont longtemps fait battre le cœur des quartiers. Mais à partir des années 1950, le rideau commence à tomber.
Le promeneur attentif peut reconnaître le bâtiment qui abritait le Théâtre VOX à la vue de son toit arrondi. (Photo: Google Earth)

La télévision d’abord, qui s’installe dans les salons et change les habitudes. Puis la fuite vers les banlieues, qui vide les rues commerçantes de leurs cinéphiles. Dans les années 1970, les multiplexes flambant neufs des centres commerciaux achèvent ce que la télé avait commencé : plus de choix, plus de confort, plus de stationnement.
Les vieux cinémas indépendants, souvent logés dans des bâtiments coûteux à entretenir, n’ont pas survécu à cette modernité pressée. Et quand la vidéo, puis le streaming, sont venus offrir le cinéma à la maison, la boucle était bouclée.

